En permaculture, la reproduction végétative est une méthode de multiplication des plantes qui permet d’obtenir de nouveaux individus à partir de segments de plantes existants, sans passer par le processus de germination des graines. Cette technique présente de nombreux avantages : elle permet de reproduire fidèlement les caractéristiques de la plante mère, d’accélérer la propagation de certaines espèces, et de favoriser la résilience et la diversité du jardin. Que ce soit par bouturage, marcottage, division des touffes ou greffage, ces méthodes offrent une alternative efficace et rapide pour enrichir le jardin en nouvelles plantes. Dans cet article, nous allons explorer en détail les principales techniques de reproduction végétative utilisées en permaculture, comment les mettre en pratique, et quels en sont les bénéfices pour un système permaculturel.
Bouturage : multiplier facilement les plantes à partir de tiges, feuilles ou racines
Le bouturage est une méthode de multiplication végétative qui consiste à prélever un morceau de plante (tige, feuille, racine) et à le planter pour qu’il développe des racines et devienne une plante indépendante. C’est l’une des techniques les plus simples et les plus rapides pour propager des plantes.
Bouturage de tiges : multiplication rapide des arbustes et plantes aromatiques
Le bouturage de tiges est la méthode la plus courante, utilisée pour les plantes ligneuses ou semi-ligneuses comme les arbustes, les plantes aromatiques et certaines plantes vivaces. On coupe une tige de la plante mère, puis on la plante dans un milieu favorable à l’enracinement.
- Méthode : Coupe une tige d’environ 15 à 20 cm, retire les feuilles du bas pour ne garder que quelques feuilles en haut, et plante-la dans un substrat léger (mélange de sable et de terreau). Maintiens le substrat humide jusqu’à ce que des racines se forment, généralement en 3 à 6 semaines.
- Plantes adaptées : Romarin, sauge, lavande, cassis, groseillier, vigne, figuier, rosier.
Exemple pratique : Pour bouturer la lavande, prélève une tige non fleurie au printemps ou en automne, coupe-la juste en dessous d’un nœud, retire les feuilles du bas, et plante la bouture dans un pot avec du terreau et du sable. Garde le substrat humide et à l’abri du soleil direct jusqu’à l’apparition des racines.
Bouturage de feuilles : multiplication des plantes succulentes et certaines vivaces
Certaines plantes, comme les succulentes ou les bégonias, peuvent être multipliées à partir de simples feuilles. La feuille, posée sur un substrat humide, développe des racines et de nouvelles pousses.
- Méthode : Coupe une feuille en bonne santé, laisse sécher la coupe pendant un jour ou deux pour éviter les maladies, puis pose-la sur un substrat léger et maintiens-le légèrement humide. Après quelques semaines, des racines et de nouvelles petites plantes apparaîtront à la base de la feuille.
- Plantes adaptées : Aloe vera, echeveria, bégonia, sansevieria, kalanchoé.
Exemple pratique : Pour multiplier l’aloe vera, coupe une feuille mature à la base de la plante, laisse sécher la coupe pendant 48 heures, puis plante-la verticalement dans un pot avec un substrat bien drainé. Arrose légèrement jusqu’à ce que de nouvelles pousses apparaissent.
Bouturage de racines : technique pour les plantes vivaces et les arbustes ligneux
Le bouturage de racines consiste à prélever un morceau de racine de la plante mère et à le replanter. Cette technique est utilisée pour les plantes qui développent des racines adventives capables de produire de nouvelles pousses.
- Méthode : En automne ou en hiver, déterre délicatement la plante mère et coupe des segments de racines d’environ 5 à 10 cm. Plante ces segments verticalement dans un substrat léger et garde-le humide jusqu’à ce que des pousses apparaissent.
- Plantes adaptées : Framboisier, mûrier, consoude, rhubarbe, pavot, pivoine.
Exemple pratique : Pour le framboisier, en hiver, prélève des racines d’environ 10 cm de long et plante-les dans un pot ou directement en pleine terre. Arrose régulièrement et attends que des pousses apparaissent au printemps.
Marcottage : enracinement d’une tige sans la séparer de la plante mère
Le marcottage est une technique qui consiste à provoquer l’enracinement d’une tige encore attachée à la plante mère. Cela permet de multiplier les plantes tout en assurant leur alimentation par la plante mère jusqu’à ce qu’elles soient prêtes à être séparées.
Marcottage par couchage : enterrer une tige pour favoriser l’enracinement
Cette technique consiste à courber une tige flexible vers le sol, à l’enterrer légèrement, et à la laisser ainsi jusqu’à ce que des racines se forment. Une fois enracinée, la nouvelle plante peut être séparée de la plante mère.
- Méthode : Choisis une tige souple et saine, courbe-la vers le sol, entaille légèrement l’écorce de la tige à l’endroit où elle sera enterrée pour stimuler l’enracinement. Couvre cette partie de terre et maintiens-la en place avec une pierre ou un crochet. Arrose régulièrement. Après quelques mois, coupe la tige une fois les racines bien développées.
- Plantes adaptées : Ronce, framboisier, groseillier, vigne, jasmin, hortensia.
Exemple pratique : Pour le groseillier, au printemps, courbe une branche basse vers le sol, entaille-la légèrement et enterre la partie entaillée. Couvre de terre et arrose régulièrement. À l’automne, des racines se seront formées et tu pourras séparer la nouvelle plante de la plante mère.
Marcottage aérien : enracinement d’une tige aérienne
Le marcottage aérien est utilisé pour les plantes ligneuses ou les arbres. Il consiste à faire raciner une tige aérienne en l’entourant d’un substrat humide (sphaigne ou terreau) maintenu en place par un film plastique jusqu’à l’apparition des racines.
- Méthode : Choisis une tige saine, enlève un anneau d’écorce d’environ 1 à 2 cm de large. Enroule cette zone avec de la sphaigne humide ou un mélange de terreau et maintiens-le en place avec du film plastique. Garde le tout humide. Après quelques mois, des racines se formeront sous le film plastique.
- Plantes adaptées : Figuier, agrumes, magnolia, camélia, bougainvillier.
Exemple pratique : Pour un ficus, enlève un anneau d’écorce d’environ 2 cm, enroule la zone avec de la sphaigne humide, et couvre de film plastique. Vérifie régulièrement l’humidité. Après quelques mois, des racines se forment. Coupe sous la zone racinée et plante dans un pot.
Division des touffes : multiplier les plantes vivaces par séparation
La division des touffes est une technique de multiplication végétative qui consiste à diviser une plante en plusieurs parties, chacune avec ses racines et ses pousses. Elle est particulièrement adaptée aux plantes vivaces qui forment des touffes denses.
Division des vivaces herbacées : régénérer et multiplier les plantes
Les vivaces herbacées, qui forment des touffes denses, peuvent être divisées tous les 3 à 5 ans pour les rajeunir et les multiplier. Cette technique favorise aussi leur floraison et leur vigueur.
- Méthode : Au printemps ou en automne, déterre la plante entière avec une bêche, puis divise-la en plusieurs parties en utilisant un couteau tranchant ou tes mains. Replante chaque division dans un sol bien préparé.
- Plantes adaptées : Rhubarbe, ciboulette, consoude, menthe, mélisse, fougère, hémérocalle.
Exemple pratique : Pour la rhubarbe, au début du printemps, déterre le pied entier et divise-le en plusieurs morceaux avec au moins un bourgeon chacun. Replante chaque morceau dans un sol enrichi de compost.
Division des bulbes et des rhizomes : multiplier les plantes à partir de leurs organes souterrains
Les plantes qui produisent des bulbes, des rhizomes ou des tubercules peuvent être multipliées en divisant ces organes souterrains. Cela permet de multiplier rapidement les plantes tout en préservant leurs caractéristiques.
- Méthode : Déterre les bulbes ou les rhizomes après la floraison ou à la fin de la saison. Sépare les nouveaux bulbes ou les rhizomes secondaires et replante-les immédiatement dans un sol bien préparé.
- Plantes adaptées : Iris, ail, oignon, tulipe, dahlia, gingembre.
Exemple pratique : Pour l’iris, au début de l’automne, déterre les rhizomes, coupe-les en morceaux avec au moins un nœud ou un bourgeon chacun, puis replante chaque morceau à 5 cm de profondeur, en laissant une partie visible au-dessus du sol.
Division des graminées et des plantes couvre-sol : densifier rapidement les plantations
Les graminées et les plantes couvre-sol, qui ont tendance à s’étaler, peuvent être divisées pour densifier les massifs ou étendre leur couverture au sol.
- Méthode : Déterre une touffe avec une bêche, divise-la en plusieurs sections avec un couteau ou une pelle, puis replante chaque section à une certaine distance pour favoriser leur extension.
- Plantes adaptées : Miscanthus, fétuque, carex, pervenche, lierre, géranium vivace.
Exemple pratique : Pour le miscanthus, au début du printemps, déterre une touffe mature, divise-la en plusieurs morceaux avec des racines et replante chaque morceau à 30-50 cm d’intervalle pour créer une haie dense.
Greffage : combiner les caractéristiques de deux plantes
Le greffage est une technique qui consiste à unir deux plantes (le greffon et le porte-greffe) pour qu’elles forment une seule plante. Cette méthode permet de combiner les caractéristiques bénéfiques de deux plantes différentes, comme la résistance aux maladies d’une variété et la qualité des fruits d’une autre.
Greffage en fente : méthode simple pour les arbres fruitiers
Le greffage en fente est une méthode simple et courante pour les arbres fruitiers. Elle consiste à insérer un greffon (un morceau de tige avec plusieurs bourgeons) dans une fente pratiquée sur le porte-greffe.
- Méthode : Choisis un porte-greffe sain et coupe-le à l’horizontale. Fais une fente verticale au centre. Taille la base du greffon en biseau pour qu’il s’insère parfaitement dans la fente. Maintiens le greffon en place avec du ruban de greffage ou de la cire. Laisse le temps à la greffe de prendre.
- Plantes adaptées : Pommier, poirier, cerisier, prunier, abricotier.
Exemple pratique : Pour greffer un pommier, coupe le porte-greffe à environ 1 m du sol, fais une fente verticale, et insère un greffon de la variété souhaitée taillé en biseau. Scelle avec de la cire de greffage et attends la reprise au printemps.
Greffage en écusson : méthode pour les agrumes et les rosiers
Le greffage en écusson consiste à insérer un bourgeon dans l’écorce du porte-greffe. C’est une technique souvent utilisée pour les agrumes et les rosiers.
- Méthode : Fais une incision en forme de « T » dans l’écorce du porte-greffe, insère un bourgeon prélevé avec un peu d’écorce, et maintiens-le en place avec un ruban de greffage. En quelques semaines, le bourgeon s’attachera et produira de nouvelles pousses.
- Plantes adaptées : Rosier, citronnier, oranger, pêcher.
Exemple pratique : Pour greffer un rosier, prélève un bourgeon sain sur la variété souhaitée, fais une incision en « T » sur le porte-greffe, insère le bourgeon et maintiens-le avec un ruban. En quelques semaines, le bourgeon devrait commencer à pousser.
Stolons et rejets : propagation naturelle de certaines plantes
Les stolons et les rejets sont des structures végétatives que certaines plantes utilisent pour se propager naturellement. Ces méthodes sont idéales pour densifier les cultures ou créer de nouvelles plantes sans effort supplémentaire.
Propagation par stolons : fraisiers et plantes rampantes
Les stolons sont des tiges horizontales qui s’étendent à partir de la plante mère et produisent de nouvelles plantes à intervalles réguliers. Les fraisiers, par exemple, utilisent cette méthode pour s’étendre rapidement.
- Méthode : Laisse les stolons se développer naturellement. Une fois qu’ils ont formé des racines et de nouvelles plantes, coupe-les de la plante mère et replante-les où tu le souhaites.
- Plantes adaptées : Fraisier, chlorophytum, menthe, bugle rampant.
Exemple pratique : Laisse les stolons de fraisiers se développer dans le potager. Une fois qu’ils ont formé des racines, sépare les nouvelles plantes et replante-les à un autre endroit pour étendre la culture.
Propagation par rejets : plantes ligneuses et vivaces
Les rejets sont des pousses qui émergent à partir des racines ou de la base d’une plante mère. Ils peuvent être séparés de la plante mère pour former de nouvelles plantes.
- Méthode : Choisis un rejet bien formé, avec ses propres racines. Détache-le soigneusement de la plante mère à l’aide d’un couteau ou d’une bêche, puis replante-le immédiatement dans un sol bien préparé.
- Plantes adaptées : Framboisier, bambou, bananier, figuier, lilas.
Exemple pratique : Pour le framboisier, au printemps, prélève les rejets qui émergent autour de la plante mère avec une bêche. Replante-les immédiatement à un autre endroit du jardin pour créer une nouvelle haie fruitière.
Conclusion
Les techniques de reproduction végétative sont des outils puissants en permaculture pour multiplier les plantes, enrichir la biodiversité du jardin et renforcer la résilience des cultures. Que ce soit par le bouturage, le marcottage, la division, le greffage, ou l’utilisation des stolons et des rejets, chaque méthode offre des avantages spécifiques pour propager des plantes adaptées à ton jardin. En maîtrisant ces techniques, tu peux rapidement densifier ton jardin, préserver les caractéristiques des plantes les plus vigoureuses, et créer un écosystème productif et diversifié. La reproduction végétative est une stratégie complémentaire à la reproduction par semis, qui permet d’accélérer la croissance des plantes et de garantir une diversité génétique stable tout en répondant aux besoins d’un système permaculturel durable et résilient. 🌿🌱🌻
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