Meilleures pratiques pour utiliser les déchets compostés afin d’enrichir les sols en permaculture

En permaculture, le compostage des déchets organiques est une pratique fondamentale pour recycler les nutriments et améliorer la fertilité des sols. Le compost, produit à partir des résidus de cuisine, des déchets verts, du fumier et d’autres matières biodégradables, est une ressource précieuse pour créer des sols vivants et productifs. Il améliore la structure du sol, augmente sa capacité à retenir l’eau, et fournit des nutriments essentiels aux plantes. Cependant, pour maximiser les bienfaits du compost, il est crucial de l’utiliser correctement. Voici un guide des meilleures pratiques pour utiliser les déchets compostés afin d’enrichir les sols dans un projet permaculturel, en respectant les principes écologiques et en optimisant la santé des écosystèmes.

Comprendre le compost mûr : Savoir quand et comment l’utiliser

Avant d’appliquer le compost sur les sols, il est essentiel de s’assurer qu’il est bien mûr et adapté aux besoins des cultures. Un compost bien décomposé est stable, riche en nutriments et exempt de pathogènes. Voici comment reconnaître le compost mûr et l’utiliser efficacement.

Identifier un compost mûr et de qualité

  1. Aspect et texture :
    • Un compost mûr doit être de couleur sombre, homogène, et friable. Les matières initiales (feuilles, épluchures, branches) ne doivent plus être reconnaissables.
    • La texture doit être légère et grumeleuse, avec une bonne rétention d’eau sans être collante.
  2. Odeur :
    • Un compost prêt à l’emploi dégage une odeur de terre fraîche. S’il sent encore l’ammoniac, la pourriture ou le moisi, il n’est pas encore mûr et nécessite un temps de maturation supplémentaire.
    • Une odeur désagréable peut indiquer un excès d’humidité ou une décomposition incomplète.
  3. Température :
    • Un compost mûr est à température ambiante. S’il est encore chaud au centre, cela signifie que le processus de décomposition est toujours actif et qu’il n’est pas encore prêt à être utilisé.
    • Si nécessaire, laisse le compost reposer encore quelques semaines pour qu’il se stabilise.

Types de compost et leur utilisation

  1. Compost à maturation rapide (3-6 mois) :
    • Produit par des composteurs thermophiles ou rotatifs, ce compost est riche en nutriments et peut être utilisé pour les cultures gourmandes en nutriments (tomates, courges, choux).
    • Applique-le en début de saison de croissance pour fournir un apport rapide en nutriments.
  2. Compost à maturation lente (6-12 mois) :
    • Compost produit par les méthodes traditionnelles en tas ou en andain. Il est plus stable et convient à une utilisation générale pour améliorer la structure du sol.
    • Utilise-le en fin de saison ou lors de la préparation des parcelles pour les cultures suivantes.
  3. Lombricompost :
    • Riche en nutriments disponibles et en micro-organismes bénéfiques, il est parfait pour les semis, les plantes en pot, et les cultures sensibles.
    • Mélange-le avec du terreau pour les semis ou applique-le en surface autour des plantes pour favoriser la croissance.

Test de maturité et de qualité du compost

  1. Test de germination :
    • Mélange une petite quantité de compost avec de la terre et sème des graines (radis ou cresson). Si les graines germent bien et que les plantules poussent sans déformation, le compost est mûr et sans toxicité.
    • Ce test permet de s’assurer que le compost n’est pas trop riche en sels minéraux ou en ammoniac, ce qui pourrait brûler les racines des plantes.
  2. Test d’odeur :
    • Prenez une poignée de compost, pressez-la et sentez-la. L’odeur doit être agréable, rappelant la terre forestière. Si le compost sent le soufre, l’ammoniac ou la moisissure, il n’est pas encore prêt.
  3. Analyse du pH :
    • Un pH compris entre 6,5 et 8 est idéal pour la plupart des utilisations au jardin. Utilise un testeur de pH pour vérifier que le compost est neutre à légèrement alcalin.

Méthodes d’application du compost : Techniques adaptées aux besoins des cultures et des sols

L’application du compost doit être adaptée aux besoins spécifiques des cultures et à la nature du sol. Il existe différentes méthodes pour utiliser le compost de manière optimale, qu’il s’agisse d’amender le sol, de pailler les cultures ou de préparer des engrais liquides.

Incorporation dans le sol : Préparer les parcelles et les buttes de culture

  1. Amendement de fond :
    • Avant de planter ou de semer, incorpore le compost en surface (5 à 10 cm de profondeur) à raison de 3 à 5 kg/m². Cela enrichit le sol en matière organique et prépare un environnement favorable aux jeunes plants.
    • Utilise cette méthode pour les cultures gourmandes en nutriments, comme les légumes-feuilles, les cucurbitacées ou les pommes de terre.
  2. Préparation des buttes en permaculture :
    • Lorsque tu crées des buttes, incorpore le compost dans les premières couches (20-30 cm) pour enrichir le sol dès le début. Les buttes en hugelkultur bénéficient particulièrement de cette méthode, car le compost accélère la décomposition du bois.
    • Utilise un compost bien mûr et stabilisé pour éviter une décomposition excessive qui pourrait chauffer les racines des plantes.
  3. Regarnissage des sols épuisés :
    • Pour les sols appauvris ou dégradés, applique une couche de compost de 5 à 10 cm sur la surface, puis mélange superficiellement avec la terre.
    • Cela favorise la réhabilitation du sol en améliorant sa structure, sa capacité de rétention d’eau et en apportant des nutriments essentiels.

Paillage et mulching : Protéger le sol et réduire les besoins en eau

  1. Paillage au compost :
    • Applique une couche de compost de 3 à 5 cm autour des plantes pour protéger le sol, conserver l’humidité et limiter la croissance des mauvaises herbes.
    • Idéal pour les cultures pérennes (arbres fruitiers, arbustes) et les massifs de fleurs. Renouvelle la couche de compost chaque année pour maintenir un bon niveau de matière organique.
  2. Mulching avec mélange de compost :
    • Mélange le compost avec des matières plus grossières (paille, feuilles mortes, copeaux de bois) pour créer un paillis plus durable qui améliore la structure du sol tout en le protégeant.
    • Utilise ce paillis dans le potager ou le jardin de plantes vivaces pour nourrir le sol progressivement et réduire les besoins en arrosage.
  3. Compost en surface (top-dressing) :
    • Applique une fine couche de compost (1 à 2 cm) en surface autour des plantes. Cette technique, appelée « top-dressing », nourrit les plantes et stimule l’activité microbienne en surface.
    • Idéale pour les pelouses, les prairies fleuries ou les couvre-sol vivaces.

Préparation de compost liquide : Apporter des nutriments rapidement disponibles

  1. Thé de compost :
    • Prépare un thé de compost en mélangeant une partie de compost avec 5 à 10 parties d’eau non chlorée. Laisse reposer le mélange pendant 24 à 48 heures en remuant de temps en temps.
    • Filtre le mélange et utilise le liquide pour arroser les plantes ou pulvériser les feuilles. Ce thé de compost est riche en micro-organismes et en nutriments solubles, idéal pour stimuler la croissance des plantes et renforcer leur résistance aux maladies.
  2. Extrait liquide fermenté :
    • Utilise un compost bien mûr et mélangé avec de l’eau dans un récipient fermé. Laisse fermenter pendant 1 à 2 semaines, en remuant régulièrement.
    • Dilue cet extrait avant de l’utiliser (1:10) pour éviter de brûler les plantes. Applique-le au pied des plantes gourmandes en nutriments (tomates, courgettes) pour un apport rapide en éléments nutritifs.
  3. Lixiviat de lombricompost :
    • Le lixiviat, ou “thé de vers”, est le liquide qui s’écoule du lombricomposteur. Utilise-le dilué (1:10) pour arroser les plantes. Il est particulièrement riche en nutriments rapidement assimilables.
    • Applique-le directement sur les racines pour nourrir les plantes en croissance active ou en pulvérisation foliaire pour une action rapide.

Utilisation du compost pour différents types de cultures : Adapter les apports aux besoins spécifiques

Chaque type de culture a des besoins spécifiques en matière organique et en nutriments. Adapter l’utilisation du compost en fonction des plantes cultivées permet de maximiser les bénéfices pour la croissance et la santé des cultures.

Cultures potagères gourmandes en nutriments

  1. Légumes-fruits :
    • Les tomates, courgettes, poivrons, et aubergines sont très gourmands en nutriments. Applique une bonne dose de compost bien mûr dans les trous de plantation ou en top-dressing autour des plants.
    • Renouvelle l’apport en cours de saison avec un paillage de compost pour maintenir un apport constant de nutriments.
  2. Légumes-feuilles :
    • Les salades, épinards, choux, et autres légumes-feuilles bénéficient d’un apport en azote pour une croissance rapide et saine. Mélange du compost riche en matière organique au sol avant la plantation.
    • Utilise également un thé de compost dilué pour arroser les feuilles en cours de croissance, favorisant ainsi une production abondante.
  3. Légumes-racines :
    • Les carottes, betteraves, radis et pommes de terre nécessitent un sol bien structuré et riche en nutriments. Applique le compost en surface, puis incorpore-le légèrement dans les 5 à 10 cm supérieurs du sol.
    • Évite les composts trop frais ou trop riches en azote, qui peuvent favoriser le développement foliaire au détriment des racines.

Cultures pérennes et arbres fruitiers

  1. Arbres fruitiers et arbustes :
    • Pour les arbres fruitiers (pommiers, poiriers, pruniers) et les arbustes (groseilliers, framboisiers), applique une couche de compost de 5 à 10 cm d’épaisseur en cercle autour de la base de l’arbre, à environ 50 cm du tronc.
    • Utilise du compost bien mûr pour éviter une décomposition excessive près des racines. Renouvelle l’apport au printemps et à l’automne pour maintenir un sol fertile.
  2. Petits fruits :
    • Les fraisiers, framboisiers, cassissiers, et groseilliers bénéficient d’un apport en compost pour encourager une bonne fructification. Applique 3 à 5 cm de compost autour des plants en fin d’hiver ou au début du printemps.
    • Un apport supplémentaire de thé de compost pendant la période de floraison et de fructification stimule la production de fruits.
  3. Plantes médicinales et aromatiques :
    • Les plantes aromatiques (thym, romarin, sauge) préfèrent un sol moins riche. Utilise le compost en faible quantité, mélangé à de la terre ou du sable, pour améliorer la structure sans excès de nutriments.
    • Pour les plantes médicinales plus gourmandes (consoude, ortie), un apport généreux de compost au printemps favorise leur croissance rapide.

Prairies, pelouses et couverts végétaux

  1. Prairies fleuries et couverts végétaux :
    • Les prairies fleuries et les couverts végétaux bénéficient d’un apport de compost pour améliorer la biodiversité du sol et la vigueur des plantes. Applique 1 à 2 cm de compost en surface au printemps ou en automne.
    • Pour les engrais verts, utilise le compost en amendement avant le semis pour favoriser une croissance rapide et une bonne fixation de l’azote.
  2. Pelouses et gazons :
    • Le compost améliore la structure du sol sous les pelouses et favorise un enracinement profond du gazon. Applique 0,5 à 1 cm de compost finement tamisé sur la pelouse au printemps et à l’automne.
    • Utilise également le thé de compost pour arroser les pelouses après la tonte, apportant des nutriments rapidement assimilables.
  3. Jardinage en no-till (sans labour) :
    • Pour les cultures en no-till, applique une couche de compost de 5 à 10 cm en surface, sans l’incorporer au sol. Cela crée un mulch vivant qui nourrit le sol en décomposition lente.
    • Combine-le avec un paillage de matières brunes pour améliorer la rétention d’humidité et favoriser l’activité microbienne.

Précautions et bonnes pratiques pour l’utilisation du compost : Optimiser les effets tout en évitant les erreurs courantes

L’utilisation du compost dans un système permaculturel nécessite quelques précautions pour éviter les erreurs courantes qui pourraient nuire aux cultures ou au sol. Voici les bonnes pratiques à suivre pour tirer le meilleur parti de cette ressource précieuse.

Éviter les excès et les déséquilibres

  1. Ne pas surdoser le compost :
    • Un excès de compost peut provoquer une saturation du sol en nutriments, en particulier en azote, ce qui peut entraîner des déséquilibres et nuire aux plantes sensibles.
    • Applique le compost en fonction des besoins des cultures, en ajustant les quantités selon la nature du sol et les exigences des plantes.
  2. Éviter le compost trop frais :
    • Un compost non mûr contient encore des micro-organismes actifs qui consomment de l’azote pour continuer la décomposition, privant ainsi les plantes de cet élément essentiel.
    • Utilise toujours un compost bien décomposé, ou laisse-le mûrir avant de l’incorporer au sol.
  3. Attention aux sols acides :
    • Si ton sol est naturellement acide, évite d’utiliser trop de compost à base de matières riches en acides (écorces, résidus de conifères). Privilégie un compost à base de feuilles de feuillus ou de fumier bien composté.
    • Vérifie le pH du sol et ajuste l’apport de compost en conséquence pour maintenir un pH équilibré pour les cultures.

Combiner le compost avec d’autres amendements naturels

  1. Biochar et compost :
    • Le biochar, un charbon végétal, combiné au compost améliore la rétention d’eau et de nutriments, tout en stabilisant le carbone dans le sol.
    • Mélange le biochar au compost avant de l’appliquer au sol, particulièrement pour les sols légers ou sableux.
  2. Mycorhizes et micro-organismes bénéfiques :
    • Inocule le compost avec des mycorhizes ou des micro-organismes bénéfiques (comme les EM – micro-organismes efficaces) pour enrichir le sol en vie microbienne et favoriser la symbiose avec les racines des plantes.
    • Applique ce compost enrichi au moment de la plantation pour favoriser l’établissement des jeunes plants.
  3. Roches minérales et compost :
    • Ajoute des roches minérales broyées (basalte, argile, dolomie) au compost pour enrichir le sol en oligo-éléments (magnésium, calcium, fer).
    • Mélange ces minéraux directement au compost avant de l’appliquer pour améliorer la disponibilité des nutriments.

Surveillance et ajustements au fil des saisons

  1. Observer les cultures et le sol :
    • Surveille régulièrement l’état des cultures et la structure du sol après l’application du compost. Adapte les apports en fonction des signes de carence ou d’excès.
    • Les feuilles jaunissantes peuvent indiquer un excès d’azote, tandis qu’un sol trop compact peut nécessiter davantage de compost pour l’aérer.
  2. Apports fractionnés :
    • Au lieu d’appliquer tout le compost en une seule fois, réalise des apports fractionnés au cours de la saison de croissance pour nourrir les plantes progressivement.
    • Combine les apports de compost avec d’autres amendements comme le paillage organique ou le thé de compost.
  3. Rétention d’eau et mulch :
    • Dans les zones sèches ou les périodes de sécheresse, recouvre le compost d’un paillis de feuilles, de paille ou de bois raméal fragmenté (BRF) pour conserver l’humidité et protéger le sol de l’érosion.
    • Cette couche de mulch réduit l’évaporation et crée un microclimat favorable aux micro-organismes du sol.

Utiliser les déchets compostés pour enrichir les sols en permaculture est une pratique essentielle pour créer un écosystème productif et durable. En appliquant le compost de manière appropriée, en fonction des besoins des cultures et des caractéristiques du sol, on peut améliorer la fertilité, la structure et la résilience du sol tout en favorisant la biodiversité microbienne. Un compost bien géré et utilisé avec précaution devient un atout précieux pour la permaculture, aidant à régénérer les sols et à soutenir des cultures saines et abondantes. 🌿💚💪

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