Créer un jardin-forêt en permaculture consiste à sélectionner et associer des plantes qui remplissent différentes fonctions dans l’écosystème tout en fournissant des récoltes variées tout au long de l’année. Un système de jardin-forêt équilibré et résilient repose sur un mélange judicieux d’arbres, d’arbustes et de plantes vivaces qui, ensemble, forment un écosystème riche en biodiversité, capable de s’autoréguler et de produire durablement. La sélection des plantes doit être faite en tenant compte du climat, du type de sol, de l’espace disponible, et des objectifs du jardinier.

Cet article explique comment choisir les arbres, les arbustes et les plantes vivaces pour un système de jardin-forêt, en détaillant les critères de sélection et en donnant des exemples de plantes adaptées à différentes conditions et fonctions.

Sélection des arbres pour la canopée et la sous-canopée

Les arbres sont les piliers du jardin-forêt. Ils structurent le paysage, influencent le microclimat et jouent un rôle fondamental dans la production de nourriture et de matériaux. Lors du choix des arbres, il faut tenir compte de leur taille, de leurs besoins en lumière et en eau, ainsi que de leur rôle écologique (production, fixation d’azote, protection).

Arbres de canopée : ombre, microclimat et production de ressources

Les arbres de canopée sont les plus grands du jardin-forêt. Ils doivent être choisis en fonction de leur capacité à résister aux conditions locales et à fournir des ressources comme des fruits, des noix ou du bois.

Critères de sélection :

• Taille et étalement : Les arbres de canopée doivent être suffisamment espacés pour ne pas créer une ombre excessive qui limiterait la croissance des strates inférieures.
• Production de nourriture : Choisis des arbres qui produisent des fruits ou des noix adaptés au climat et aux besoins alimentaires.
• Rôle écologique : Privilégie les arbres qui contribuent à la fertilité du sol (arbres fixateurs d’azote) ou à la biodiversité (abris pour la faune).

Exemples d’arbres de canopée :

• Châtaignier (Castanea sativa) : Produit des châtaignes, tolère les climats tempérés, préfère les sols bien drainés.
• Noyer (Juglans regia) : Fournit des noix et du bois de qualité, aime les climats tempérés à chauds, demande de l’espace.
• Murier (Morus alba/nigra) : Produit des mûres abondantes, tolère la sécheresse et les sols pauvres, attire les oiseaux.
• Chêne (Quercus spp.) : Produit des glands, important pour la biodiversité, supporte divers climats, les chênes rouges et blancs sont utiles pour le bois.

Arbres de sous-canopée : soutien, production et fixation de l’azote

Les arbres de sous-canopée sont plus petits et se placent sous les arbres de canopée, fournissant des fruits, de l’ombre partielle, et des services écosystémiques comme la fixation d’azote.

Critères de sélection :

• Tolérance à l’ombre : Les arbres de sous-canopée doivent supporter l’ombre partielle créée par la canopée supérieure.
• Production alimentaire : Choisis des arbres fruitiers qui s’adaptent bien au climat local.
• Rôle de soutien : Certains arbres, comme les fixateurs d’azote, améliorent la fertilité du sol pour les autres plantes.

Exemples d’arbres de sous-canopée :

• Pommier (Malus domestica) : Produit des pommes, tolère l’ombre partielle, adapté aux climats tempérés.
• Poiriers (Pyrus communis) : Produit des poires, tolère les hivers froids, aime les sols bien drainés.
• Prunier (Prunus domestica) : Produit des prunes, résiste au froid, préfère les climats tempérés.
• Aulne (Alnus glutinosa) : Fixateur d’azote, tolère les sols humides, améliore la fertilité du sol.

Exemple pratique :

Pour un jardin-forêt en climat tempéré, plante un noyer et un châtaignier en canopée, avec des pommiers et des pruniers en sous-canopée. L’aulne, en plus de fixer l’azote, fournira de l’ombre partielle et améliorera la santé du sol.

Choix des arbustes : production, protection et biodiversité

Les arbustes jouent un rôle intermédiaire dans le jardin-forêt, fournissant des baies, des fruits, et des services écologiques tels que la protection contre les vents, la fixation de l’azote, et la création d’habitats pour la faune. Ils se placent sous les arbres de canopée et de sous-canopée, et peuvent également être utilisés pour former des haies ou des bordures.

Critères de sélection des arbustes :

• Taille et forme : Choisis des arbustes adaptés à l’espace disponible sous la canopée, sans ombrager excessivement les strates inférieures.
• Production alimentaire : Privilégie les arbustes à baies et petits fruits, qui diversifient les récoltes.
• Résilience et facilité d’entretien : Opte pour des arbustes adaptés aux conditions locales, résistants aux maladies et nécessitant peu d’entretien.
• Rôle écologique : Intègre des arbustes qui fournissent un abri et de la nourriture pour les pollinisateurs et la faune.

Exemples d’arbustes pour le jardin-forêt :

• Cassis (Ribes nigrum) : Produit des baies riches en vitamine C, tolère l’ombre partielle, aime les sols humides.
• Framboisier (Rubus idaeus) : Produit des framboises, préfère les sols riches, tolère l’ombre partielle.
• Groseillier (Ribes rubrum) : Produit des groseilles, tolère l’ombre, aime les sols bien drainés.
• Argousier (Hippophae rhamnoides) : Produit des baies riches en vitamines, tolère les sols pauvres, fixateur d’azote.
• Sureau noir (Sambucus nigra) : Produit des baies comestibles, attire les oiseaux, tolère divers types de sols.

Utilisation des arbustes dans le jardin-forêt :

• Haies et bordures : Utilise des arbustes pour créer des haies productives et des bordures protectrices, abritant la faune et protégeant le jardin des vents.
• Soutien à la biodiversité : Plante des arbustes à fleurs et à baies pour attirer les pollinisateurs et fournir un habitat aux oiseaux et aux petits mammifères.

Exemple pratique :

Plante des framboisiers et des groseilliers sous les pommiers et les pruniers. Utilise des sureau et des argousiers pour former une haie vivante qui protège le jardin du vent et attire la faune.

Sélection des plantes vivaces : production et soutien écologique

Les plantes vivaces sont des éléments clés du jardin-forêt, car elles offrent une production alimentaire pérenne et fournissent divers services écologiques. Elles peuvent être utilisées comme couvre-sol, plantes médicinales, plantes compagnes, ou fixatrices d’azote. Leur choix dépend de leur rôle spécifique et de leur adaptation aux conditions locales.

Critères de sélection des plantes vivaces :

• Adaptation au climat et au sol : Choisis des vivaces adaptées au climat local et au type de sol (acide, basique, sec, humide).
• Rôle dans le système : Sélectionne des plantes qui remplissent des fonctions précises, comme la fixation de l’azote, l’attraction des pollinisateurs, la protection du sol, ou la production alimentaire.
• Pérennité et facilité d’entretien : Privilégie les plantes robustes, qui demandent peu d’entretien une fois établies et qui résistent aux maladies et aux ravageurs.

Exemples de plantes vivaces pour le jardin-forêt :

• Consoude (Symphytum officinale) : Plante médicinale, améliore la structure du sol, attire les pollinisateurs.
• Menthe (Mentha spp.) : Plante aromatique, répulsive pour certains insectes, aime l’ombre partielle.
• Ciboulette (Allium schoenoprasum) : Plante aromatique, tolère l’ombre partielle, repousse les insectes nuisibles.
• Artichaut (Cynara scolymus) : Plante comestible, aime les sols riches et bien drainés, résistant au froid modéré.
• Rhubarbe (Rheum rhabarbarum) : Plante comestible, aime l’ombre partielle, tolère les sols riches.

Rôle des plantes vivaces dans le jardin-forêt :

• Fixation de l’azote : Les plantes vivaces comme le trèfle ou la luzerne enrichissent le sol en azote, favorisant la croissance des autres plantes.
• Protection du sol : Les couvre-sol vivaces comme les fraises des bois ou le lierre terrestre réduisent l’érosion et limitent l’évaporation.
• Attraction des pollinisateurs et des auxiliaires : Les plantes à fleurs vivaces comme la bourrache attirent les abeilles et les papillons, tandis que les plantes aromatiques repoussent les ravageurs.

Exemple pratique :

Sous les arbustes fruitiers comme les framboisiers et les cassis, plante des menthes et des ciboulettes pour repousser les ravageurs et améliorer la biodiversité. Ajoute de la consoude pour enrichir le sol et attirer les pollinisateurs.

Créer des guildes de plantes : synergies et soutien mutuel

Dans un jardin-forêt, les plantes sont organisées en guildes, des groupes de plantes qui interagissent de manière bénéfique. Chaque guilde est centrée autour d’une plante clé, souvent un arbre fruitier, et est composée de plantes qui remplissent des rôles complémentaires.

Principes de conception des guildes :

• Plante clé : Choisis un arbre ou un arbuste productif comme point central de la guilde.
• Plantes compagnes : Intègre des plantes qui fixent l’azote, repoussent les ravageurs, attirent les pollinisateurs, ou améliorent la structure du sol.
• Couvre-sol : Utilise des plantes couvre-sol pour protéger le sol, conserver l’humidité, et limiter les mauvaises herbes.

Exemples de guildes typiques :

• Guilde autour du pommier : Pommier comme plante clé, consoude pour enrichir le sol, ail et ciboulette pour repousser les ravageurs, fraises des bois comme couvre-sol comestible.
• Guilde autour du noyer : Noyer comme plante clé, trèfle blanc pour fixer l’azote, menthe pour repousser les insectes, violettes comme couvre-sol.
• Guilde autour du figuier : Figuier comme plante clé, lavande pour attirer les pollinisateurs et repousser les insectes, luzerne pour fixer l’azote, origan comme couvre-sol.

Exemple pratique :

Crée une guilde autour d’un pommier en plantant des consoudes à ses pieds pour enrichir le sol, des menthes et des ciboulettes pour repousser les insectes, et des fraises des bois comme couvre-sol comestible et protecteur.

Adapter le choix des plantes aux conditions spécifiques du jardin

Chaque jardin-forêt a des conditions uniques qui influencent le choix des plantes : climat, type de sol, disponibilité en eau, et espace. Adapter la sélection des plantes à ces conditions permet de maximiser leur résilience et leur productivité.

Climat tempéré : diversité et rusticité

• Arbres : Pommiers, poiriers, pruniers, châtaigniers, noyers.
• Arbustes : Cassis, groseilliers, framboisiers, sureau, argousier.
• Plantes vivaces : Consoude, rhubarbe, ciboulette, fraises des bois.

Climat méditerranéen : tolérance à la sécheresse

• Arbres : Oliviers, figuiers, amandiers, caroubiers.
• Arbustes : Romarin, lavande, argousier, laurier-sauce.
• Plantes vivaces : Thym, origan, sauge, artichaut.

Climat tropical : résistance à la chaleur et à l’humidité

• Arbres : Manguier, avocatier, papayer, bananier.
• Arbustes : Hibiscus, manioc, goyavier.
• Plantes vivaces : Patate douce, gombo, arachide, arachide pintade.

Climat aride : gestion de l’eau et résilience

• Arbres : Grenadier, acacia, caroubier, pistachier.
• Arbustes : Lavande, sauge, argousier, olivier de Bohême.
• Plantes vivaces : Luzerne, luzerne arborescente, thym, romarin.

Exemple pratique :

Dans un jardin-forêt méditerranéen, plante des figuiers et des oliviers comme arbres principaux, des romarins et des lavandes comme arbustes, et des thyms et sauges comme plantes vivaces aromatiques et médicinales.

Conclusion

Le choix des arbres, arbustes et plantes vivaces dans un jardin-forêt est essentiel pour créer un écosystème productif et résilient. En sélectionnant des plantes adaptées au climat et au sol, en les associant en guildes complémentaires, et en tenant compte de leurs rôles écologiques, tu pourras concevoir un jardin-forêt harmonieux, capable de fournir nourriture, habitat et services écosystémiques tout en respectant les principes de la permaculture. 🌳

Pour aller plus loin :

• Qu’est-ce qu’un jardin-forêt en permaculture et comment fonctionne-t-il ?
• Principaux avantages écologiques du jardin-forêt pour la biodiversité et la fertilité du sol
• Concevoir un jardin-forêt adapté à un climat et un sol spécifiques
• Quelles sont les différentes strates d’un jardin-forêt et quelles plantes les composent ?
• Avantages de l’agroforesterie pour améliorer la gestion de l’eau et du sol
• Comment intégrer des animaux dans un système d’agroforesterie ou de jardin-forêt pour en maximiser les bénéfices ?
• Techniques de plantation et d’entretien spécifiques aux systèmes de jardin-forêt ?
• Comment la création de microclimats dans un jardin-forêt favorise-t-elle la résilience des plantes ?
• Gérer la succession naturelle des plantes dans un jardin-forêt pour assurer sa pérennité
• Impacts à long terme de l’agroforesterie sur la fertilité des sols et la conservation de la biodiversité
• Comment un jardin-forêt ou un système d’agroforesterie contribue-t-il à la séquestration du carbone ?
• Erreurs courantes à éviter lors de la mise en place d’un jardin-forêt ou d’un système d’agroforesterie
• Comment associer les plantes annuelles et vivaces dans un jardin-forêt pour une production alimentaire durable ?