Intégrer les déjections animales comme engrais naturel dans un système permaculturel

Les déjections animales sont une ressource précieuse pour améliorer la fertilité du sol et soutenir la santé des plantes dans un système permaculturel. Elles fournissent un apport équilibré en nutriments essentiels, tels que l’azote, le phosphore et le potassium, tout en augmentant la matière organique et en favorisant la vie microbienne. Toutefois, pour en tirer le meilleur parti et éviter les désagréments (odeurs, risques sanitaires, pollution), il est crucial de bien gérer leur collecte, leur traitement et leur utilisation. Voici un guide détaillé sur les différentes façons d’intégrer les déjections animales comme engrais naturel dans ton jardin permaculturel, les types de déjections à privilégier selon les besoins des cultures, et des techniques pour maximiser leur efficacité tout en minimisant les impacts négatifs.

Les différents types de déjections animales et leurs spécificités

Fientes de volailles : un engrais riche en azote pour une fertilisation rapide

Les fientes de volailles (poules, canards, pigeons) sont l’un des engrais naturels les plus concentrés, particulièrement riches en azote.

  • Composition et avantages : Les fientes de volailles contiennent environ 1,5 à 2 % d’azote, 1 % de phosphore et 0,5 % de potassium. L’azote qu’elles apportent est rapidement disponible, stimulant la croissance végétative des plantes. Le phosphore favorise le développement des racines et la floraison, tandis que le potassium améliore la résistance des plantes.
  • Utilisation recommandée : Les fientes de volailles sont idéales pour les cultures gourmandes en azote, comme les légumes-feuilles (salades, épinards), les courges ou les plantes à croissance rapide. Elles doivent être utilisées avec précaution, car leur concentration élevée peut brûler les racines si elles sont appliquées fraîches.
  • Précautions : Les fientes de volailles doivent être compostées avant utilisation directe sur le sol. Le compostage réduit leur teneur en ammoniac, stabilise l’azote et élimine les pathogènes potentiels. En compost, elles peuvent être appliquées en surface ou mélangées avec le sol avant les semis.

Astuce pratique : Mélange les fientes de volailles avec des matières carbonées (paille, feuilles mortes) pour équilibrer le rapport carbone/azote et favoriser un compostage rapide. Applique ce compost au printemps, environ un mois avant la plantation des cultures gourmandes.

Fumier de ruminants : un engrais équilibré pour améliorer la structure du sol

Le fumier de ruminants (vaches, moutons, chèvres) est un engrais naturel plus équilibré, riche en matière organique et modérément nutritif.

  • Composition et avantages : Le fumier de ruminants contient environ 0,5 à 1 % d’azote, 0,3 % de phosphore et 0,5 % de potassium, ainsi qu’une forte proportion de matière organique. Il libère ses nutriments lentement, ce qui en fait un amendement idéal pour les sols qui nécessitent une amélioration durable de leur structure et de leur fertilité.
  • Utilisation recommandée : Le fumier de ruminants est particulièrement bénéfique pour les cultures de longue durée, comme les arbres fruitiers, les arbustes et les légumes-racines (carottes, pommes de terre). Il améliore la rétention d’eau et favorise l’activité microbienne.
  • Précautions : Il est préférable de composter le fumier de ruminants avant de l’utiliser dans le jardin, surtout pour les cultures maraîchères, afin de détruire les graines de mauvaises herbes et les éventuels pathogènes. Applique le fumier composté en automne ou au début du printemps.

Astuce pratique : Utilise le fumier de ruminants pour pailler les arbres fruitiers ou les haies. Applique-le en couche épaisse autour des plantes, en évitant le contact direct avec les troncs ou les tiges, pour nourrir progressivement le sol.

Crottes de lapins : un engrais doux et directement utilisable

Les crottes de lapins sont des granulés secs et riches en nutriments, qui peuvent être utilisés directement comme engrais sans compostage préalable.

  • Composition et avantages : Les crottes de lapins contiennent environ 2 % d’azote, 1 % de phosphore et 1 % de potassium, ainsi qu’une bonne proportion de fibres. Leur structure granulée favorise une décomposition lente et progressive, idéale pour les jeunes plants ou les cultures sensibles.
  • Utilisation recommandée : Utilise les crottes de lapins pour enrichir les substrats de semis, les cultures en pot ou les légumes à croissance lente. Elles sont également adaptées pour fertiliser les plantes pérennes, comme les arbustes fruitiers ou les plantes aromatiques.
  • Précautions : Bien que les crottes de lapins puissent être utilisées directement, il est recommandé de les mélanger au sol ou de les incorporer dans un compost pour améliorer leur distribution et éviter les accumulations.

Astuce pratique : Récupère les crottes de lapins dans un bac sous les clapiers et mélange-les avec du compost ou du terreau pour préparer des substrats de culture riches et équilibrés. Applique-les directement en surface ou incorpore-les légèrement dans le sol.

Déjections des cochons : un engrais polyvalent avec précautions

Les déjections des cochons, riches en nutriments, peuvent être un excellent amendement, mais elles doivent être gérées avec précaution.

  • Composition et avantages : Les déjections de cochons contiennent environ 1 % d’azote, 0,6 % de phosphore et 0,8 % de potassium, ainsi que de la matière organique et de l’ammoniac. Elles sont riches en matière organique et en nutriments, ce qui les rend intéressantes pour améliorer la fertilité des sols pauvres ou épuisés.
  • Utilisation recommandée : Utilise les déjections de cochons pour enrichir les sols des cultures pérennes, comme les vergers ou les haies, ou pour régénérer les parcelles en friche. Elles sont également utiles pour fertiliser les zones destinées aux cultures exigeantes en nutriments.
  • Précautions : Les déjections de cochons doivent absolument être compostées avant d’être utilisées dans le jardin, car elles peuvent contenir des pathogènes et des parasites transmissibles à l’homme. Le compostage permet de stabiliser les nutriments et de réduire les risques sanitaires.

Astuce pratique : Composte les déjections de cochons avec de la paille et des résidus de jardin pour créer un amendement riche et équilibré. Utilise ce compost pour préparer le sol avant la plantation d’arbres fruitiers ou de légumes gourmands en nutriments.

Techniques de compostage pour valoriser les déjections animales

Compostage en tas : une méthode traditionnelle et efficace

Le compostage en tas permet de transformer les déjections animales en un engrais stable et équilibré, facile à utiliser dans le jardin.

  • Principe du compostage en tas : Le compostage en tas consiste à accumuler les déjections animales avec des matières carbonées (paille, feuilles mortes, copeaux de bois) dans un tas d’au moins un mètre cube. Le tas doit être régulièrement retourné pour assurer une bonne aération et un équilibre entre les matériaux verts (riches en azote) et bruns (riches en carbone).
  • Avantages du compostage en tas : Cette méthode permet de détruire les pathogènes, de stabiliser les nutriments et de produire un compost homogène. Le compostage en tas est adapté à tous les types de déjections animales, y compris les plus concentrées comme les fientes de volailles.
  • Inconvénients et précautions : Le compostage en tas nécessite de l’espace et un suivi régulier (aération, humidité). Il est important de surveiller la température (50-70°C) pour assurer une décomposition rapide et efficace.

Astuce pratique : Mélange les déjections animales avec des résidus de cuisine ou de jardin pour équilibrer le rapport carbone/azote. Couvre le tas avec une bâche ou de la paille pour maintenir l’humidité et la température.

Litière accumulée : une solution pratique et peu exigeante

La litière accumulée est une méthode simple de gestion des déjections animales sur place, qui permet de créer un compost directement sous les animaux.

  • Principe de la litière accumulée : La litière accumulée consiste à laisser les déjections animales se décomposer sur place, en ajoutant régulièrement des matières carbonées (paille, copeaux de bois) pour absorber l’humidité et contrôler les odeurs. Au fil du temps, les couches de déjections et de paille se décomposent, formant un compost riche et fertile.
  • Avantages de la litière accumulée : Cette méthode est simple, peu exigeante en main-d’œuvre et permet de créer un compost directement utilisable sans besoin de retournement. Elle est idéale pour les petits élevages (poules, lapins, chèvres) et pour les sols pauvres en matière organique.
  • Inconvénients et précautions : La litière accumulée peut attirer les nuisibles (rongeurs, mouches) si elle est mal gérée. Il est important de maintenir un bon équilibre entre matières carbonées et azotées et de veiller à ce que la litière reste sèche en surface.

Astuce pratique : Après plusieurs mois, récupère la litière accumulée et laisse-la composter encore quelques semaines avant de l’utiliser comme amendement pour les cultures de longue durée ou les arbres fruitiers.

Vermicompostage : valorisation rapide et qualitative des petites déjections

Le vermicompostage est une méthode rapide et efficace pour transformer les petites déjections, comme les crottes de lapins ou les fientes de poules, en un humus de haute qualité.

  • Principe du vermicompostage : Le vermicompostage consiste à utiliser des vers de terre (essentiellement des Eisenia fetida) pour décomposer les déjections animales mélangées à des matières organiques légères (feuilles, carton). Les vers transforment ces matières en un humus riche en nutriments et en micro-organismes bénéfiques.
  • Avantages du vermicompostage : Le vermicompost est un engrais très riche et stable, idéal pour les semis, les jeunes plants et les cultures sensibles. Il est facile à produire à petite échelle et permet de recycler rapidement les petites quantités de déjections animales.
  • Inconvénients et précautions : Le vermicompostage nécessite un certain soin : les vers sont sensibles aux excès d’humidité, de chaleur ou d’acidité. Il est important de maintenir un environnement stable et de ne pas surcharger le système en déjections fraîches.

Astuce pratique : Mélange les déjections animales avec du carton et des feuilles pour créer un substrat léger et aéré. Évite d’ajouter trop de matières acides (agrumes, tomates) et maintiens une humidité modérée pour favoriser l’activité des vers.

Application des déjections animales dans le jardin permaculturel

Application directe et paillage : une fertilisation douce et progressive

L’application directe des déjections animales, surtout celles compostées, est une méthode simple et efficace pour enrichir le sol et protéger les cultures.

  • Principe de l’application directe : Les déjections animales bien compostées ou mûries peuvent être appliquées directement sur le sol autour des plantes ou utilisées comme paillage. Elles apportent des nutriments progressivement et améliorent la structure du sol en augmentant la matière organique.
  • Avantages de l’application directe : Cette méthode est idéale pour les cultures pérennes (arbres fruitiers, arbustes) ou les plantes gourmandes en nutriments. Elle protège le sol contre l’érosion, réduit l’évaporation et stimule l’activité biologique du sol.
  • Inconvénients et précautions : Évite d’utiliser des déjections fraîches ou mal compostées, car elles peuvent brûler les racines des plantes et favoriser la prolifération de pathogènes. Applique une couche de 2 à 5 cm, en évitant le contact direct avec les tiges ou les troncs.

Astuce pratique : Utilise les fientes de volailles compostées pour les légumes-feuilles et les crottes de lapins comme paillage autour des plantes sensibles. Évite les applications directes pendant la période de floraison pour ne pas stimuler une croissance excessive au détriment de la fructification.

Préparation des sols et des substrats avec les déjections animales

Les déjections animales compostées peuvent être utilisées pour préparer les sols avant les semis ou pour enrichir les substrats de culture.

  • Amendement des sols : Incorpore les déjections animales compostées dans le sol avant les semis ou les plantations. Pour les cultures annuelles, mélange-les avec la terre à une profondeur de 10-15 cm. Pour les arbres et arbustes, creuse des trous de plantation et mélange le compost avec la terre de rebouchage.
  • Préparation des substrats de semis : Les déjections animales compostées, mélangées avec du terreau et du sable, forment un substrat léger et riche, idéal pour les semis. Utilise un mélange 1/3 compost, 1/3 terreau et 1/3 sable pour les semis en godet ou en pépinière.
  • Amendement des cultures en pot : Les déjections animales compostées, incorporées au substrat de culture, améliorent la rétention d’eau et la disponibilité des nutriments. Utilise-les pour les plantes en pot ou les cultures en bacs, en veillant à bien les mélanger au terreau.

Astuce pratique : Pour préparer les sols avant les semis, épands le compost de déjections animales sur la surface et incorpore-le avec un léger griffage. Laisse reposer le sol pendant 2 à 3 semaines avant de planter pour éviter une libération excessive d’azote.

Thés de compost et extraits fermentés : fertilisation liquide et rapide

Les thés de compost et les extraits fermentés de déjections animales sont des fertilisants liquides qui apportent rapidement des nutriments et des micro-organismes aux plantes.

  • Préparation du thé de compost : Place les déjections animales compostées dans un sac en toile et laisse-le tremper dans un seau d’eau pendant une à deux semaines. Filtre le liquide et dilue-le à 10 % avant de l’appliquer aux plantes. Ce thé de compost stimule la croissance végétative et améliore la résistance aux maladies.
  • Préparation des extraits fermentés : Les déjections animales mélangées avec des matières organiques (feuilles, résidus de cuisine) et de l’eau, laissées à fermenter pendant quelques semaines, produisent un extrait riche en nutriments et en micro-organismes. Dilue cet extrait à 5 % avant de l’utiliser en arrosage.
  • Utilisation et précautions : Applique les thés de compost et les extraits fermentés au pied des plantes ou en pulvérisation foliaire. Évite les applications pendant les heures chaudes de la journée et dilue toujours les extraits pour éviter de brûler les plantes.

Astuce pratique : Prépare des petits lots de thé de compost à utiliser dans la semaine pour conserver leur efficacité. Utilise les extraits fermentés pour les plantes en pot ou les cultures sensibles aux carences en nutriments.

Pratiques et précautions pour une utilisation durable des déjections animales

Équilibrer les apports de déjections et de matière organique

Pour maximiser les bénéfices des déjections animales sans déséquilibrer le sol, il est essentiel de combiner les apports en déjections avec d’autres matières organiques.

  • Combinaison avec des engrais verts : Associe les déjections animales avec des engrais verts (légumineuses, moutarde, phacélie) pour augmenter la biomasse et améliorer la structure du sol. Les engrais verts fixent l’azote atmosphérique et augmentent la matière organique, complétant les apports des déjections.
  • Paillage et couverture du sol : Utilise des paillis organiques (paille, foin, feuilles mortes) en complément des déjections animales pour maintenir l’humidité et protéger le sol. Le paillage empêche également la volatilisation de l’ammoniac et la lixiviation des nutriments.
  • Rotations de cultures : Pratique les rotations de cultures pour éviter l’accumulation de certains nutriments et favoriser la régénération du sol. Les légumineuses et les cultures à faible exigence en azote (légumes-racines) équilibrent les apports des cultures gourmandes en azote.

Astuce pratique : Alterne les apports de déjections animales avec des résidus de culture et des engrais verts pour maintenir un équilibre nutritif dans le sol. Laisse chaque parcelle se reposer au moins une saison avec une couverture végétale pour éviter l’épuisement des nutriments.

Éviter les excès et les pollutions diffuses

Les déjections animales sont riches en nutriments, mais leur usage excessif peut entraîner des pollutions diffuses et des déséquilibres dans le sol.

  • Précautions contre les excès d’azote : Les excès d’azote, notamment avec les fientes de volailles, peuvent brûler les racines des plantes et favoriser la prolifération de maladies foliaires. Limite les apports à 2-3 kg de fientes compostées par mètre carré et évite les applications en période de floraison.
  • Risque de lessivage et de pollution des nappes : Les déjections animales, mal gérées, peuvent entraîner des pollutions par nitrates. Évite d’appliquer des déjections fraîches en période de forte pluie ou sur des sols en pente. Privilégie les applications avant les semis ou les plantations pour que les plantes absorbent les nutriments rapidement.
  • Contrôle des pathogènes et des parasites : Le compostage à haute température (50-70°C) détruit la plupart des pathogènes et des parasites présents dans les déjections animales. Assure-toi que le compost est bien décomposé avant de l’appliquer aux cultures maraîchères ou aux légumes racines.

Astuce pratique : Pratique des tests de sol réguliers pour évaluer la teneur en nutriments et ajuster les apports de déjections animales en conséquence. Utilise des bordures végétales et des bandes enherbées pour filtrer les nutriments en excès et éviter les ruissellements.

Suivi et ajustement des pratiques

Pour optimiser l’utilisation des déjections animales, il est important de suivre les effets sur le sol et les cultures et d’ajuster les pratiques en fonction des résultats.

  • Observation de la croissance des plantes : Surveille la santé des plantes, leur croissance et leur floraison. Des feuilles jaunissantes, une croissance ralentie ou des symptômes de carences peuvent indiquer un déséquilibre des nutriments. Ajuste les apports en fonction des besoins spécifiques des cultures.
  • Suivi de la structure du sol : Évalue régulièrement la structure du sol, sa porosité, sa rétention d’eau et son activité biologique (présence de vers de terre, odeur de sol sain). Un sol trop compact ou saturé en matière organique peut nécessiter des ajustements.
  • Adaptation des apports : En fonction des observations, ajuste les quantités de déjections animales appliquées, leur fréquence et leur mode d’application. Réduis les apports si le sol montre des signes de saturation en nutriments ou si les cultures ne répondent pas positivement.

Astuce pratique : Maintiens un journal de bord pour noter les apports de déjections animales, les observations sur la santé des cultures et l’état du sol. Utilise ces informations pour planifier les apports futurs et améliorer tes pratiques.

Conclusion

Les déjections animales, utilisées comme engrais naturel dans un système permaculturel, sont une ressource inestimable pour améliorer la fertilité du sol, soutenir la santé des plantes et boucler les cycles de nutriments. En comprenant les spécificités de chaque type de déjections et en les intégrant judicieusement dans le jardin (compostage, paillage, thés de compost), tu peux maximiser leurs bénéfices tout en évitant les impacts négatifs. En suivant les bonnes pratiques de gestion, comme le compostage, l’équilibrage des apports et le suivi des effets sur le sol et les cultures, tu contribueras à créer un écosystème vivant, résilient et productif. Prêt(e) à valoriser ces ressources naturelles pour transformer ton jardin en un véritable écosystème de permaculture ?

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